mercredi 6 mai 2009

Ishtar, la Gorgone (deuxième partie)


Ceci est la deuxième partie du texte "Ishtar, la Gorgone", la première partie se trouve en dessous de ce texte et date du 18 avril 2009.

Christian s’approchait de plus en plus de la silhouette. C’était Ishtar la grande, Ishtar la dangereuse, Ishtar la menaçante debout sur le bord de la corniche; les nuages noirs cloués sur sa tête. Étrangement, ses cheveux n’étaient plus attachés comme la veille et se dressaient tels les serpents de Méduse. Le jaune de ses yeux a disparu, laissant place à des yeux d’une noirceur indescriptible. L’eau de la pluie collait son sari noir sur son corps, laissant apparaître ses ondulations.

Une peur comme jamais ressentie auparavant envahit soudainement le corps de Christian, des larmes se mirent à couler sur ses joues et ses jambes étaient incapables de faire un pas de plus. Il était debout, l’air ébahi à quelques dizaines de pas de la gitane. Il regrettait d’être venu, il entendait Nico maudire le jour où il ne l’a pas écouté, voyait les pleurs de sa mère; voyait sa Rachel sa chère patronne, qui était aussi son amie et sa confidente, crier, rugir et pleurer à l’annonce d’une nouvelle atroce.

Sa gorge était nouée et aucun souffle n’y passait.

Ishtar le regarda droit dans les yeux, leva sa main gauche droit devant elle et de son index lui fit signe d’avancer vers elle. Elle le possédait, les jambes de Christian avancèrent son corps toutes seules tel une proie donnée en offrande à une déesse cruelle et sans pitié.

Il était à deux pas d’elle et une odeur de souffre envahissait ses poumons, l’affaiblissant de plus en plus.

« Que me voulez-vous, pourquoi moi? » pensa-t-il
« Tu m’es destiné, Yéshlikh me l’a annoncé » lui dit-elle d’une voix malicieuse
« Vous m’entendez?! Qui est ce Yéshlikh? Comment faire pour retrouver ma voix »
D’un air froid et majestueux, elle le regarda dans les yeux et lui dit « Tu es mon destin Priape, fils d’Adonis. Je suis la fille de Yéshlikh, Dieu des mers et des océans en furie »

Elle lui toucha l’épaule et une force divine l’envahit, sa pensée quitta son être…

… elle venait de le nommer fils d’Adonis, il n’avait jamais eu de père. Adonis, homme d’une extrême beauté, avait été abandonné sur le chemin d’Aphrodite, déesse de l’amour et des plaisirs. Elle en tomba éperdument amoureuse et le confia à son amie Perséphone, déesse des enfers afin qu’elle le garde en sécurité. Elle revint le chercher quelques années plus tard pour trouver que Perséphone s’en était épris; elles se le disputèrent.

Zeus résolut leur conflit en ordonnant à Adonis de passer le tiers de l’année avec Aphrodite dans la montagne de Byblos, le tiers avec Perséphone dans le monde souterrain et le dernier avec la personne de son choix. Adonis respecta les exigences du roi des dieux et décida de consacrer le tiers de l'année restant à Aphrodite afin de vivre pleinement son amour pour elle.

Christian venait d’un monde différent! Dans son village, un certain ésotérisme régnait; un ésotérisme qui se caractérisait en premier lieu par la beauté mystérieuse des villageois. Ils avaient tous ces grands yeux clairs qui contrastaient leur teint foncé. Leur beauté était reconnue dans tout le pays et leurs terres étaient toujours verdoyantes et fertiles, même lors des pires sécheresses. Il pouvait compter par centaines les miracles auxquels il a assisté. Le chaman du village l’avait prédit, il était le descendant d’Adonis, le sang qui coulait dans ses veines était divin. Il lui prédit également que sa destinée était grande, bien plus grande qu’il ne le pensait. Les souvenirs de son enfance coulent à flot et sa mémoire lui revint mais il demeure figé au souvenir d’une première journée d’un printemps; il s’était perdu dans le maquis et se trouvait face d’un homme imposant, beau et mystérieux qui le tendait la main et lui dit « Priape, mon fils, je te cherchais… »
« Vous vous trompez de personne Monsieur » et il parti en courant.

Un cri répétitif ne cesse de résonner dans sa tête, il ouvre les yeux et c’est l’alarme qui indique 7:10. Ce n’était qu’un rêve, il se mit à rire dans son lit et des sons sortaient de sa bouche, ses cordes vocales étaient remplies de vie et toute cette histoire n’était qu’un vulgaire rêve! Il se lève, se rase, prend sa douche, s’asperge de parfum dans son rituel qui lui est propre, repasse sa chemise, fait son nœud de cravate, enfile son veston et prépare dans sa tête la nouvelle journée de travail qui s’annonce…

En passant par la corniche, il ne put s’empêcher de regarder les passants et de voir si Ishtar vagabondait sur la côte. Une fois arrivé au travail Rachel l’attendait et le regarda « alors cette voix, tu l’as retrouvée? ».

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